Sempé : Insondables mystères
"Apparente dans ses sujets (le plus souvent des êtres qui ont ce point commun d'être timides, ou intimidés), la modestie de Sempé est profonde et peut-être constitutive. Il doit aimer ceux qu'il dessine parce qu'il se retrouve en eux, et ce qu'il en retrouve est une aimable défaillance un peu lunaire en présence des grands événements, qu'il s'agisse du conseil d'administration d'une banque ou de l'inauguration d'un monument, du bal du samedi soir ou d'une course cycliste. Partout, sous l'espèce d'un industriel ou d'une petite fille, d'un violoncelliste amateur ou d'une dame qui revient du marché, l'Homme de Sempé offre le spectacle d'un léger décalage entre ce qu'il croit être et ce qu'il est ou, au contraire, d'une adéquation un peu trop parfaite à son personnage. Et ce contraire n'en est donc pas un puisqu'on perçoit le trop. Ainsi l'Homme de Sempé se trouve-t-il toujours à côté de lui-même, sans toujours bien clairement le savoir, et c'est la source du comique indulgent qui nous le rend proche." (Jacques Réda)