Barillé : Les Soeurs et autres espèces du vivant
Lucie, solaire, insaisissable, abandonne tout un beau matin pour partir à Dubaï. Un saut dans le vide perturbant pour la narratrice, sa sœur aînée peu téméraire et rêveuse.
Le renoncement. J'en étais loin concernant ma sœur, l'espoir qu'elle rentre en France me taraudait. Il me fallait me raisonner, je multipliais les admonestations à moi-même. Laisse Lucie être ce qu'elle est, joueuse et rebelle.
Lucie tient à peine sur ses petites jambes quand elle commence à apprivoiser l'usage du mot " non " et la puissance qui s'en dégage. Comme les obstacles pour les chevaux de course, les normes sont pour elle des incitations à sauter. Les normes appellent la transgression, pas l'obéissance. Transgresser lui est naturel, comme chanter pour l'oiseau.
Lucie, solaire, insaisissable, abandonne tout un beau matin pour partir à Dubaï. Un saut dans le vide perturbant pour la narratrice, sa soeur aînée peu téméraire et rêveuse, qui enquête depuis des mois sur la vie d'une femme du XVIIIe siècle, Madeleine-Françoise Basseporte, issue d'un milieu modeste, devenue botaniste du roi et peintre naturaliste, alors célébrée par les Encyclopédistes.
À quoi songe cette artiste en dessinant ses planches merveilleuses de jacinthes ou de lilas ? Et comment a-t-elle pu sombrer dans un tel oubli ?
L'oubli, est-ce aussi ce que recherche Lucie ? Comment expliquer sa fuite ? À quelle malédiction du passé veut-elle échapper ? Et qu'espère-t-elle trouver dans la capitale du matérialisme et de l'outrance ?
Rien n'est plus secret qu'une existence féminine, disait Marguerite Yourcenar. Tel est le thème magistralement renouvelé par Élisabeth Barillé dans "Les Soeurs, et autres espèces du vivant".