Aïssaoui : Dictionnaire amoureux d'Albert Camus
« J'ai longtemps pensé que j'étais le seul au monde à connaître Albert Camus, à le comprendre, et qu'il n'écrivait que pour moi. Camus, c'est mon père, mon frère, mon professeur, mon ami. Il me console des chagrins de l'existence. Avec lui, je ne me sens jamais seul. Je le comprends mieux que quiconque. Nul n'avait vécu ce que lui et moi avions vécu : la pauvreté, le vertigineux écart social entre notre milieu d'origine et celui auquel nous avons accédé, la mère analphabète qui ne lira jamais les livres que nous avons écrits, la honte, la condescendance.
Mais également le douloureux écartèlement entre deux pays, deux mondes : la France et l'Algérie. Je croyais qu'il avait pris sa plume pour me dire : « Tu vois, tu n'es pas seul. »
Plus tard, j'ai compris que Camus n'était pas qu'à moi ! Nous sommes des milliers, des millions même, à l'aimer. Il est de ceux qui élargissent le coeur et l'esprit.
Dans ma vie de journaliste, le moment le plus décisif a été la rencontre avec sa fille, Catherine, à Lourmarin, dans le Luberon. Elle m'a ouvert à l'écrivain mais aussi et surtout à l'homme qui était son père. Je la considère comme ma soeur. Alors, ce Dictionnaire amoureux, je ne pouvais pas le faire sans elle, sans sa complicité. Je la remercie, ici, pour ses confidences, sa générosité et son hospitalité. »