Saumont : Les croissants du dimanche
Trois pages suffisent à raconter une histoire.
Annie Saumont le prouve à chacun de ses nouveaux recueils qui, telles des variations musicales, explorent inlassablement les mêmes thèmes, sans jamais se répéter. Virtuose de la nouvelle, elle décrit mieux que personne ces vies minuscules confrontées en quelques pages à toutes sortes de fatalités ou de hasards malheureux. Son univers très personnel s'accroche à des détails, à des objets du quotidien. De là découlent les drames intimes les plus enfouis, comme les petits bonheurs les plus simples.
Maîtrisant parfaitement l'art de l'ellipse et de la chute, elle croque ces moments ou la vie de personnages anonymes, peuplant un univers ordinaire, chavire inexorablement. Coeurs solitaires ou abandonnés, assassins ou enfants battus, les héros de ces nouvelles sont tous des victimes, fragilisées par la cruauté d'un monde ou la peur de la mort est omniprésente. Ce qui ne les empêche pas de se battre pour leur survie.
Avec une justesse et une précision implacables, Annie Saumont fait l'inventaire des stratégies – sublimes, insensées ou dérisoires – mises en oeuvre face aux petits et grands désastres de l'existence, par des hommes et des femmes à l'irréductible rage de vivre.
En dix-neuf brefs récits, elle rend compte du malaise de nos sociétés modernes et des peurs qui nous taraudent, pour mieux secouer notre indifférence devant la souffrance des autres. Chacun de ses livres nous ouvre un peu plus les yeux sur une société ou les liens menacent de se rompre, emportant avec eux la plus belle part de nous-mêmes, notre humanité.