Dazy : Métamorphose d'un crabe (premier roman)
Autant prévenir, avec Métamorphose d’un crabe pas de vue sur la mer, de bar terrasse et d’ensoleillement record : on y vit gris, ça gagne petit, à la rude, sans trop d’air et avec nul sourire. Ce que nous dévoile, au fil de ce monologue fiévreux, de cette confession rêche, Sylvie Dazy, c’est la prison au quotidien, la vie et rien d’autre d’un fonctionnaire de la pénitentiaire. Les plaisirs et les jours d’un maton lambda, mais qui médite l’écriture d’un « grand livre sur la prison ».
Notre homme s’appelle Christo, un gars du Nord, nanti d’une absurde licence d’anglais, poussé à l’ombre de la prison de Bapaume et qui, loin du café familial, « lève l’ancre pour une exotique nature » à savoir le monde de la tôle. Car là, sans doute avec son goût de l’écoute et de son œil d’ethnologue, il pense assouvir son goût d’un ailleurs périlleux, d’une aventure en temps réel : « Du danger parfois, du risque, des armes. De la solidarité entre hommes aussi, et de la joie, les surveillants aimaient rire fort. Le matin serait une aventure. » Mais si l’aventure est là, elle prend surtout l’allure d’une ronde sans fin, rythmée par le choc des talons et le cliquetis des clés, le grondement des roulantes et les alertes soudaines : suicide, feu, émeute, une vie de déambulations dans un sempiternel corridor ponctué de remontrances, de promotions et de mutations. Ensuite viennent les hommes, surveillants et surveillés, balances et demi-chefs, faux potes et vrais dingues. « La prison est une drôle d’école, on y travaille autant à la louche qu’au pinceau délicat,c’est ce que personne ne veut comprendre.
Du Creusot, la ville ancienne des mines et de la métallurgie, Sylvie Dazy s’envole très tôt pour migrer vers Lannion et le Trégor. A 22 ans, elle devient éducatrice chargée de réinsertion aux prisons de Fleury-Mérogis et de la Santé et dit y avoir tout appris des relations humaines. La quarantaine arrivant, Sylvie Dazy fatigue de toujours commencer sa journée en frappant à la porte d’une maison d’arrêt et décide alors d’écrire, et de frapper à la porte des maisons d’édition.