Claudel : Meuse, l'oubli
Paule est morte et son amant inconsolable pleure leur histoire de bistro en bistro. Ne lui restent de sa belle Flamande que trois lettres cent fois relues et un pull angora qui conserve son odeur. Il quitte son travail, prend la fuite et s’installe dans une petite bourgade du bord de la Meuse. Loin des lieux qui l’ont vu tituber de douleur et de trop de petits vins du Rhin, il se met à écrire. Où sont ceux qui nous ont quittés, sinon dans nos mémoires et dans nos phrases ? Dans ses cahiers, il retrouve les rires et les baisers de Paule la caressante, mais aussi son visage défait par la maladie. Revient également le souvenir mauvais de celle qui n’a pas su l’aimer, la mère, « putain et fière de l’être ». Dans quel pays, dans les bras de quel homme s’abandonne-t-elle aujourd’hui ? Mais on ne peut vivre toujours avec les morts. Le pull angora a perdu son parfum, il dérive avec les mots de Paule, emporté par le courant de la Meuse. La souffrance s’efface, et la beauté insolente de Reine, qui promène sa rousseur flamboyante dans la petite ville, est un appel à la vie et à ses promesses.