Romains : Vin blanc de la Villette
«Bénin disait à Broudier :
- On pourrait boire une chopine à l'Ambassade. L'Ambassade leur plaisait par sa situation, par son intimité avec le port et par son éloignement d'avec tant de choses de ce monde. Leur âme s'y sentait à l'aise.
La salle ne manquait jamais ni d'un débardeur, ni d'un charbonnier, ni d'un éclusier, ni d'un camionneur, ni d'un cocher d'omnibus, ni même d'un buveur qui ne fût rien que cela.
-L'Ambassade, disait Bénin, m'aide à comprendre l'immortalité.
La conversation ne souffrait pas de la mobilité des causeurs. Un propos commencé avec un charbonnier, il n'était pas rare qu'on le poursuivît avec un second charbonnier, sans presque s'apercevoir que le premier avait quitté la salle pour rejoindre sa péniche ou son attelage. Bénin et Broudier n'avaient jamais trouvé un tel goût au vin blanc.»